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Quatre propositions pour réduire les nuisances aériennes sans pénaliser l’aérien

Alors que le monde entier s’est réuni au salon international du Bourget et s’est félicité des progrès réalisés par cette industrie dans laquelle la France excelle, il faut résoudre un problème : l’opposition entre trafic aérien et nuisances aériennes sonores pour les riverains. Ces derniers sont excédés par des nuisances sonores dont l’importance est mise en évidence par de nombreuses études, dont celles de Bruitparif, l’observatoire du Bruit en Ile-de-France. Les impacts sur la santé sont nombreux, en particulier sur le sommeil, avec une augmentation du risque cardiovasculaire, de l’hypertension, du stress… Les riverains sont nombreux à demander un plafonnement du nombre de vols et un moratoire nocturne (à Roissy) ou son extension (à Orly).

Mais ces demandes mettent en danger une activité économique majeure (ADP est le premier employeur de la région IDF), un secteur industriel essentiel (le transport aérien) avec des fleurons internationaux comme Airbus, et l’attractivité et le rayonnement global de notre pays avec tous les bénéfices que nous amène le tourisme international.

Le moratoire et le plafonnement ne devraient être envisagés qu’en dernier ressort, après avoir épuisé toutes les autres possibilités. Or, c’est loin d’être le cas : d’autres solutions existent, mais n’ont pas été défendues comme elles devraient l’être. Elles sont au nombre de quatre.

Couvre-Feu

La première est une mise en œuvre beaucoup plus stricte de règles actuelles sur le couvre-feu à Orly. Cet aéroport a longtemps été le seul d’Europe dans lequel atterrissages et décollages sont interdits la nuit, entre 23h30 et 6h du matin. Toutefois, le nombre d’exceptions et d’irrégularités à ce couvre-feu ont augmenté considérablement depuis la Covid. Ces vols abusifs génèrent des nuisances aériennes. Faisons respecter la loi, et ne tolérons plus ces dépassements qui doivent rester exceptionnels, pour des raisons de sécurité et non de confort.

Renouvellement des flottes

La deuxième solution consiste à poursuivre l’amélioration des performances sonores des avions. Un Airbus A320neo fait moins de bruit qu’un A320 classique qui fait lui-même moins de bruit qu’un Boeing 767. Encourageons le renouvellement des flottes. Et pour les vols de nuit, qui concernent principalement les acteurs internationaux du fret, autorisons exclusivement les avions les plus silencieux. Cela pourrait faire une différence conséquente pour les riverains ! Il est également nécessaire de traiter les nuisances aériennes des riverains des aérodromes de loisir. C’est ce que la Région Île-de-France veut faire en équipant bientôt 100% des avions-écoles de silencieux ou de nouvelles hélices 3, 4 ou 5 pales, ce qui permettra de réduire les nuisances aériennes sonores ! Ces dispositifs peuvent faire gagner jusqu’à deux catégories CALIPSO – la classification sonore de l’aviation légère – soit 3 à 6dB. Développons également les avions électriques et hydrogènes – beaucoup plus silencieux. Et cela, en particulier sur les liaisons interrégionales, plus courtes, et donc plus adaptées à ce type d’aéronefs. Le premier avion 19 places 100% électriques a volé tout récemment ; il représente une voie de progrès importante. Tous ces avions émettent également beaucoup moins de gaz à effet de serre.

Descente continue

La troisième solution est la mise en place progressive mais résolue de la descente continue. Cette technique d’approche permet de diminuer considérablement le nombre de personnes touchées par les nuisances aériennes. On en discute depuis plus de 10 ans, et la consultation publique sur Orly vient de s’achever le 15 juin. La procédure y est déjà expérimentée comme sur d’autres aéroports ; il est temps de la généraliser. Sensibilisons également les pilotes aux bonnes pratiques : comme il existe une éco-conduite pour les voitures, il existe un éco-pilotage pour les avions, qui diminue le bruit émis et le carburant consommé. Bruitparif dispose du plus grand réseau de capteurs sonores au monde. Il pourra évaluer finement le changement en termes de nuisances aériennes sonores pour les populations. Les données publiques et objectives faciliteront la tenue d’un débat apaisé, alors qu’il faut restaurer la confiance et le dialogue.

Protéger les riverains

La quatrième est l’utilisation de la TNSA (Taxe sur les nuisances sonores aériennes). Celle-ci est destinée à permettre aux habitants de se protéger du bruit, en changeant les fenêtres, en isolant les habitations. Mais aujourd’hui, le reste à charge, sur des travaux de plus en plus coûteux, reste un obstacle infranchissable pour des foyers modestes et frappés par la crise. Il faudrait faire passer à 100% le taux d’indemnisations pour les particuliers (comme c’est déjà le cas pour les collectivités). Les fonds récoltés pour la TNSA permettent actuellement un tel fonctionnement. Élargissons également son usage aux foyers qui auraient entrepris des travaux il y a plus de 20 ans et qui en sont aujourd’hui exclus. Les technologies ont beaucoup progressé et pourraient leur offrir un bien meilleur confort.

Si on mettait en œuvre résolument ces quatre propositions, on pourrait améliorer considérablement la vie des riverains des aéroports. Faute de l’avoir fait, les citoyens se sentent abandonnés, la méfiance grandit et les solutions extrêmes et démagogiques fleurissent.

Nous pouvons construire une vision progressiste de l’aviation dans notre pays et protéger la santé de nos concitoyens. Cela repose sur une action volontaire pour diminuer l’impact des déplacements aériens. C’est possible, et ce sera mieux pour les riverains, pour l’emploi, pour l’industrie et pour la France.

 Ce texte a été publié dans L’Opinion le 27 juin 2023 et cosigné par Valérie Pécresse, présidente du Conseil régional d’Ile-de-France.

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